21 juillet 2012

Dakar doit et veut juger l'ancien Président tchadien


Y a-t-il une chance de voir l'ancien président tchadien Hissène Habré dépouillé de ses boubous blancs et de sa morgue, dans le box d'un tribunal sénégalais ? Puis, enfin, condamné en tenue de bagnard, les chaînes aux pieds, le crâne et la barbe rasés ? Les prisonniers survivants échappés des massacres de l'abjecte DDS, sa police politique, délivrés par les colonnes du colonel Déby qui l'avaient mis en fuite, le corps décharné, le regard creux, erraient dans les rues de N'Djamena, encore marqués par l'épouvante des tortures et l'horreur des cellules maculées de sang.

Vingt-deux ans que celui que les Tchadiens appellent toujours le bourreau vit à Dakar un exil doré, protégé par une garde personnelle, bardé d'une équipe d'avocats, couvert par les présidents sénégalais successifs.

Vingt-deux ans sans que jamais personne lui ait demandé des comptes. Pour les 40.000 morts exécutés sur son seul ordre, tués d'une balle dans la nuque, mitraillés dans leurs villages, étranglés pendant les interrogatoires, enterrés vivants ou jetés pêle-mêle dans ses fameuses « fosses de 200 », les yeux remplis de terre, la bouche remplie de terre, écartés du respect de Dieu.

Vingt-deux ans que le "bâtard" de Faya devenu président se promène impuni dans la capitale sénégalaise, reçoit, justifie ses crimes sans remord au nom de la raison d'Etat.

Coup de tonnerre dans le ciel tranquille de l'exilé, la cour de justice internationale vient de sommer le Sénégal de poursuivre sans aucun autre délai l'ancien président tchadien accusé de génocide. La ministre de la Justice du Sénégal, Amina Touré, au vu de cette décision, a réitéré « la volonté ferme » de son pays de tenir un procès juste et équitable... avant fin 2012.

Vingt-deux ans d'attente. Les 40.0000 Tchadiens liquidés sans jugement au fond des cachots par les tueurs froids comme des couteaux de la DDS n'ont pas eu la chance d'attendre vingt-deux ans pour mourir.